Congo: la politique de se servir et non servir…Le Dza le Nwa

L’argent et la politique n’en finissent pas d’entretenir des relations intimes, parfois incestueuses. La course à l’enrichissement illicite attire plus les nouveaux acteurs politiques congolais depuis l’ouverture démocratique en 1992. Pas tous cependant.
L’information circule sous le manteau à Brazzaville, un ancien ministre des finances du Congo, sur la période 2016- 2022, revend ses immobilisations. L’homme, rongé par le « mpiaka » (assèchement financier), a vu son train de vie fondre comme la marque de beurre Alima au soleil. Il n’est pas rare de voir un ministre congolais jouer au distributeur automatique pendant son séjour au gouvernement, avant d’en être réduit à la disette voire au mendiant de la République une fois qu’il en est defenestré. Depuis les attentats du 11 septembre 2001 perpétrés par des fondamentalistes musulmans, les américains ont fait imposer au monde entier des mesures de tracking de flux financier en circulation. Ce qui, par conséquent, bloque l’alimentation de tout compte bancaire, en dizaines, centaines de millions ou plus, par une personne qui ne peut en justifier la provenance. Les paradis fiscaux et surtout la thesaurisation (des malles d’argent dans les maisons) seraient la dernière trouvaille des nouveaux riches politiques en Afrique. Ceux du Congo usent des mêmes pratiques quand ils ne se lancent pas dans l’acquisition des biens meubles et immeubles quel que en soit le prix. Une manière de se débarrasser du pactole entreposé chez lui.
Un banquier ayant requis l’anonymat nous confiait récemment faire l’objet des sollicitudes de la part d’une autorité qui voulait se débarrasser des « nguiris » qu’il aurait gardés at home. Aïe! L’homme redoutait l’arrivée de la nouvelle gamme de billets de banque Beac. Plus peur que de mal, les anciens billets ne sont pas déclassés.
L’argent et la politique au Congo entretiennent des rapports obsessionnels, rytmés d’effusions voluptueuses, de haines passionnées, et marques d’une propension à la perversité voire à l’enrichissement illicite. Dans un pays où un ministre, soupçonné d’actes de prévérication, croupit difficilement en prison, ce laxisme volontaire, à la fois honteuse et inaltérable, a toujours suscité curiosité et intérêt, alimentant une foisonnante littérature dans les réseaux sociaux et dans les discussions de « ngandas »(bistrots de fortune) », « foula foula »(transport intra urbain par bus) et autres lieux où s’exerce parfois la sagesse populaire ou le « songui-songui »(commérage).
Il existe deux types de vie chez le politique congolais: quand il est aux affaires, et lorsqu’il est hors circuit.
Un ministre congolais en fonction sait jouer au distributeur automatique pour entretenir la cour de ses nombreux affidés et « makangus »(maîtresses). Il y en a qui peuvent remettre des centaines de millions de fcfa aux sujets étrangers chargés de les fructifier dans le business. Ouest africains et libanais en tirent meilleur profit. Souvent ces relations d’affaires se terminent mal.
Une fois hors circuit, un ancien ministre redescend sur terre et a le cou perclus d’humilité tel un enfant de chœur de l’église catholique.
À l’observation, de nombreux politiques congolais n’ont pas su emboîter le pas à Alphonse Massamba Débat, Marien Ngouabi, Joachim Yhomby- Opango, Denis Sassou Nguesso, Pascal Lissouba, Claude Ernest Ndalla, Hilaire Moutault, Camille Bongou, Ambroise Edouard Noumazalay, Lekoundzou Itihi Ossetoumba, Antoine Letembet- Ambily, Bernard Kolélas, Bokamba Yangouma, Stéphane Maurice Bongo Nouarra, David Charles Ganao, André Milongo, Jean Pierre Thystère Tchicaya, Christophe Moukouéké, Martin Mbéri, Martin Mbemba, Zéphirin Mafouana Makosso, André Obami Itou, Pierre Ngolo, Pierre Moussa…, hommes qui ont fait ou font la politique par amour et passion.
Nombreux sont venus se servir et non servir la République. Juste un constat.
A. Ndongo, journaliste économique et financier