Éric Dupond-Moretti mis en examen: quelles suites judiciaires possibles pour le ministre?

 Éric Dupond-Moretti mis en examen: quelles suites judiciaires possibles pour le ministre?

La Cour de justice de la République a décidé vendredi 16 juillet de mettre en examen le ministre de la Justice. Éric Dupond-Moretti est accusé de prise illégale d’intérêts, soupçonné d’avoir profité de sa position pour régler des comptes avec des magistrats avec qui il était en conflit quand il était encore avocat. Si, pour l’instant, toute éventualité de démission ou de remaniement est écartée, cette incrimination est toutefois embarrassante pour l’Élysée et le gouvernement.

C’est une première dans l’histoire de la Ve République. Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti est mis en examen pour prise illégale d’intérêt par la Cour de justice de la République (CJR). Il a répondu pendant près de six heures à un interrogatoire, à l’issue duquel les magistrats ont estimé qu’il aurait profité de sa position au gouvernement pour régler d’anciens conflits.

Que risque désormais Éric Dupond-Moretti et quel est le pouvoir de la CJR ?

Un juge d’instruction va être saisi, qui va instruire le dossier, à charge et à décharge. Soit ce juge va conclure au non-lieu, soit au contraire il le mettra en accusation. Dans ce cas-là, Éric Dupond-Moretti sera passible de la Cour de justice de la République et devra répondre cette fois-ci aux quinze juges de la Cour de justice.

Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit public à l’université de Lille

Jean-Philippe Derosier poursuit : « Il y a déjà eu des ministres qui, après l’exercice de leurs fonctions ont été jugés par la Cour de justice de la République. L’instruction et toute la procédure pénale prend un petit peu de temps et donc jusqu’à ce qu’elle soit saisie, si elle l’est, il se peut que le ministre et notamment M. Dupond-Moretti n’exerce plus les fonctions. Comme les peines prononcées par la CJR sont rarement des peines d’emprisonnement fermes de plus d’un an, il y a un aménagement de la peine, évitant au ministre concerné d’être enfermé dans une cellule de prison. »

En attendant, sur le plan politique, un ministre de la Justice mis en examen, cela fait désordre. Et même si Jean Castex a aussitôt fait part du renouvellement de sa confiance au Garde des Sceaux, c’est affaibli qu’Éric Dupond-Moretti va entamer une semaine pourtant cruciale. Il sera en effet en première ligne pour défendre deux textes majeurs au Parlement : le projet de loi sur le séparatisme, qu’il a porté depuis ses débuts. Mais aussi le texte sur le « passe sanitaire » dont le volet juridique promet d’être particulièrement sensible.

Le coup est rude également pour Emmanuel Macron. Désireux de garder au gouvernement le célèbre avocat qu’il considère comme une prise de guerre, le chef de l’État se retrouve face à ses contradictions. Il avait en effet jusque-là respecté la tradition voulant qu’un ministre mis en examen quitte le gouvernement. Cela lui avait d’ailleurs coûté en 2017 le départ de son plus proche allié, François Bayrou. Déjà un ministre de la Justice. Ce que ne manquent pas de rappeler depuis vendredi après-midi les opposants au président de la République.

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